DEVENIR MÉCÈNE

Vie de Charles Percier (1764-1838)

Charles Percier, né en 1764, fut un architecte fameux dans les décennies du basculement de l’Ancien Régime à la période contemporaine. En des temps singulièrement troublés, il traversa tous les régimes, de Louis XVI à Louis Philippe, et mena sans heurt une brillante carrière, au service des fastes impériaux en particulier. Seul ou avec Pierre Fontaine, l’ami d’une vie et son associé, plus à l’aise que lui dans l’art des relations publiques et le monde des affaires, il fut et reste le principal architecte de l’Empire. S’enchaînent rapidement les chantiers prestigieux, il est architecte des décors de l’Opéra (1792), du musée des Monuments français (1799), du palais des Tuileries (1800), du château de Malmaison (1802), travaille à un projet de restauration de Fontainebleau (1803), à des aménagements du Louvre, réalise le décor du sacre de Napoléon (1804), l’arc de triomphe du Carrousel, la rue de Rivoli et ses arcades (1806- 1810)… Percier dessine, pleuvent les honneurs : architecte du gouvernement (1801), membre honoraire du Conseil des Bâtiments civils (1812-1836), membre de l’Institut (1811).

La voie n’était pourtant pas tracée. Fils d’un portier au pont des Tuileries et d’une lingère de la reine Marie-Antoinette, il entre à douze ans à l’École gratuite de dessin, un établissement philanthropique créé pour permettre à des enfants pauvres d’accéder aux métiers d’art et à l’artisanat. Tôt remarqué, il se forme ensuite à l’Académie royale d’architecture, dans l’atelier d’Antoine-François Peyre, son maître, son initiateur, où il fait la connaissance de Fontaine; et remporte le Grand Prix en 1786 avec un édifice destiné à abriter les Académies : s’en suit un séjour de cinq ans à l’Académie de France à Rome, un éblouissement et une nostalgie à vie, où il étudie les monuments antiques, comme il était convenu de le faire, mais aussi du Moyen Âge, de la Renaissance et du XVIIIe siècle.

Sensibilisé dès ses années d’apprentissage à l’ornement et à la perfection graphique, il cultive une prédilection toute personnelle pour les arts décoratifs, ébénisterie, orfèvrerie, céramique, et l’aménagement intérieur. Il crée et met en scène meubles, objets d’art, tentures, soigne les jeux de couleurs et de lumières. Par goût d’un dessin peaufiné à l’extrême, il travaille, seul ou avec Fontaine, à des ouvrages pour lesquels il exécute notamment des frontispices, ceux de Palais, maisons et autres édifices modernes dessinés à Rome, des vignettes, pour les Œuvres d’Horace ou les Fables de La Fontaine. Il est d’ailleurs tenu pour l’un des promoteurs de la gravure néoclassique au trait.

Du bâti à l’éphémère, de la décoration intérieure à l’ornement du livre, les curiosités et les talents de Charles Percier donnent naissance à une œuvre rétive au cloisonnement. S’il fallait cependant trouver des constantes autour desquelles s’organise son intense activité, peut-être tiendraient-elles en trois mots : dessin : des milliers, conservés dans les collections publiques et privées ; enseignement : dès son retour d’Italie en 1791, il fut un brillant professeur formant sans relâche les plus jeunes qui appliquèrent ses préceptes en France et à l’étranger ; amitié : de jeunesse et de la maturité, architectes, dessinateurs, graveurs, ses condisciples, Pierre-Louis Baltard, Claude Bernier, Charles Normand, Pierre Fontaine, Antoine Vaudoyer, Pierre-Jules Delespine, ses aînés, Pierre Adrien Pâris, ses élèves, François Debret, Louis-Hippolyte Lebas… Malgré son goût certain pour le huis clos de son cabinet, d’autres encore, des peintres : « Percier demeurait au Louvre, il vivait en philosophe, dans une grande simplicité ; les murs de son cabinet étaient de plâtre gris, bien unis, sans aucune tenture, ils étaient recouverts entièrement de précieux dessins d’anciens maîtres et d’esquisses peintes de ses amis, qui étaient alors les David, les Gérard, les Giraudet etc. »

Il mourut en 1838 et est aujourd’hui inhumé avec ses amis, Fontaine et Bernier, le discret camarade de sa prime jeunesse. Mais nous n’en sommes pas là lorsqu’à vingt-deux ans, le 8 octobre 1786, à minuit, il se met en route pour Rome. 

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