La lettre de l’Institut de France du mois de février 2022
Le mot du chancelier
Mesdames et Messieurs, Chers amis,
Ce qui était inconcevable hier encore est la réalité d’aujourd’hui : la guerre est de retour sur notre continent. Il faut saluer tous ceux qui, dans l’adversité et le danger, ont pris conscience des principes qui fondent l’Europe et l’unissent. Dans ce sursaut moral et politique, quelle sera la place des savants, des créateurs, des penseurs ?
L’Institut de France et les cinq académies sont les héritières de la « République des Lettres » qui, au sortir du Moyen Âge, voulait dépasser les conflits politiques ou religieux du temps. Ces réseaux internationaux de lettrés et d’artistes de tous pays ont favorisé l’émergence de valeurs communes mais aussi de règles de droit. Défi sans cesse renouvelé.
Fondé en 1795, l’Institut est né lui-même en temps de guerre. Alors qu’elle défendait sa liberté, la France pensait à réunir ses meilleurs esprits. Depuis lors, les cinq académies ont compté non seulement les plus grands savants, écrivains et artistes, mais également les juristes, les philosophes et les diplomates les plus éminents : tous ceux qui ont contribué à poser les principes régulateurs des rapports entre les nations.
Au fil des siècles, la Coupole a vu commencer et finir bien des tragédies. Cette permanence est sa force. Mais si la Coupole est un symbole de paix, Bergson y fit retentir en 1914 ces mots puissants : « Une simple idée, la conception héroïque qu’un peuple s’était faite de l’honneur, lui permettait de tenir tête à un puissant empire. Dès lors, l’issue de la lutte n’était pas douteuse. […] Les peuples entonnaient du fond du deuil et de la ruine le chant de la délivrance. »